Occupation du site, qui et quand ?
Les hommes de Glozel du Moyen Age ont-ils voulu reproduire des objets plus anciens comme les galets gravés ou les objets en os décorés ? L'esthétique des dessins des objets médiévaux apparait comme beaucoup plus approximatif que celui d'objets d'apparence néolithique. Glozel a bel et bien une origine ancienne, il reste à savoir comment des objets datant de plusieurs millénaires peuvent cotoyer d'autres objets, médiévaux, eux .
La majorité des analyses donne une origine médiévale pour les os humains, centrée sur le XIIIème siècle alors que des éléments se situent entre le Ier et le IVème siècle ap JC . Les datations qui indiquent des périodes plus récentes pour certains objets ne sont pas assez nombreuses pour être significatives et en plus elles semblent correspondre à des périodes de réchaufement du sol par feux de défrichements. Les céramiques se regroupent principalement en deux pôles : une première époque de basse Antiquité (de 380 av JC à 80 ap JC) et une seconde époque, médiévale, se situant entre les XIIème et XIVème siècles.
En tout cas, les os révèlent que les hommes entérrés à Glozel étaient d'une souche robuste, leur squelette ayant été marqué par les efforts qu'a demandé la chasse et la marche. Cette région boisée, montagneuse, ne pouvait qu'offrir un terrain propice au développement d'une population au physique adapté à ce mode de vei difficile.
Glozel aurait donc était principalement fréquenté pendant une première période s'étalant de 400 av JC à 100ap JC, période durant laquelle ces hommes ont produit des objets de terre cuite (bobines, masque sans bouche, tablettes à inscriptions,...). Cette première période se caractérisant par une forte préoccupation funéraire et cultuelle. Période de colonisation romaine, charnière entre la culture gauloise et la culture romaine.
Une deuxième période de fréquentation pourrait avoir existé à Glozel entre les Xème et XIVème siècles. Les Glozéliens auraient alors été contemporains, durant cette même période, des verriers de la Montagne bourbonnaise qui exerçaient leur activité dans la région. Ces Glozéliens auraient pu produire à nouveau des objets en argile cuite, des poteries à masque sans bouche (symbolisant le monde du silence), des tablettes à inscriptions, des objets gravés en os (sans vraiment maitriser la langue glozélique, ce qui expliquerait par exemple que 6 anneaux de schistes sont indéchiffrables et que des os gravés sont dans le même cas, ces hommes du Moyen-Age ayant copié de manière approximative les signes qu'ils auraient trouvé) et auraient laissé sur le site des fragments d'ossements de leurs congénères ainsi que des sépultures. Ces sépultures exposées face au Nord, la dispersion des os de squelettes et le fait que certains os soient brisés, les masque dits de "l'Ombre" (ces masques sans bouche) ainsi que la présence de nombreux souterrains annulaires dans la région font pencher la balance pour un culte de l'ombre vivace dans cette contrée.
Ce groupe humain de Glozel aurait très bien pu s'isoler pour ses pratiques funéraires et incantatoires (tablettes inscrites, objets gravés déposés dans les tombes), refusant aussi la civilisation environnante, les nouvelles techniques de poterie que la romanisation amenait et refusant l'usage du fer (rappelons qu'aucun objet métallique ne fut trouvé à Glozel, et que le métal était très utilisé à l'époque gallo-romaine tout comme au Moyen-Age). Ils se seraient isolés dans cet espace reculé, boisé, y opérant des pratiques marginalisées.
La majorité des objets de Glozel nous renvoient à des cérémonies funéraires ou de culte.
Les anneaux de schiste portant des dédicaces, moins bien finis que la plupart trouvés sur d'autres sites et qui servaient de parure sur ces sites, auraient été fabriqués à des fins de rites religieux. Les urnes, les vases, et les tablettes de Glozel sont aussi porteuses de dédicaces. cf. déchiffrement de Hitz
Les trois tombes connues (Tome I, II et fosse ovale) de Glozel contenaient chacune une statuette qu'on a dit "bisexuée", déposée au niveau de la tête du défunt, mais qui ne sont pas toutes porteuses des 2 attributs. Elles sont donc associées aux sépultures et à culte rendu aux morts. La première statuette découverte à l'entrée de la fosse ovale était entièrement recouverte d'ocre (on a découvert une dizaine de timbres à ocre), son utilisation votive est donc claire. Ces statuettes portaient tous les attributs de la virilité et de la procréation réunis, elles pouvaient donc participer à un culte de la fértilité, de la pérennité du groupe.
Une quinzaine d'empreintes de mains droites furent découvertes à Glozel. La tombe II en comportait une dans son mobilier et la fosse ovalaire dans son dallage. On peut encore penser à une pratique magique destinée à éloigner les maléfices, on peut penser aussi à un désir d'authentification de la tombe par l'empreinte du défunt ou y voir le symbole de puissance que représente la main dans les grandes civilisations.
Les sépultures contenaient aussi des coupelles (au nombre d'une quinzaine) que Morlet a décrit comme des lampes (datées entre 270 et 90 av J.C.). Elles ont sans doute aussi participé aux cérémonies funéraires.
Le thème de l'hermaphrodysme des statuettes glozéliennes nous renvoie à des cultes passés qui ont pu être pratiqués à Glozel. Ces objets nous renvoient à la divinité originelle, à structure androgyne, procréatrice de l'Humanité. Les Glozéliens se sont peut-être appropriés ces cultes, les intégrant au culte de la Mort.
Rappelons les cultes anciens consacrés à une grande déesse-mère (proches de celui d'Attis et Cybèle), qui invitaient les Galles (les initiés qui s'engagent dans la voie de recherche spirituelle), à un niveau certain de leur engagement , à vivre rituellement ou symboliquement la castration, en pleine nature au mois de mars en l'absence de tout matériel métallique. Cette castration étant prohibée par la législation romaine, les prétendants à cet engagement devaient pratiquer leur rite à l'écart du monde, expliquant ainsi l'absence de structures construites pour ces lieux de culte. Tous les objets symboliques pour ce culte sont présents à Glozel. Cette préoccupation a pu se prolonger durant des siècles à Glozel, s'enrichissant d'autres objets votifs.
Sources : Actes du 2ème colloque Glozel 1999, analyse et synthèse de René Germain